Source photo : BestImage Cédric Perrin

Montre-toi, petit Robert !

Oui, même les mômes ont du vague à l’âme ! Mais tout peut arriver après un voyage au bout de la nuit chez Céline…

Parce que le vent n’a pas de couleur les nuits de pleine lune, le beau monde souffle des contes immoraux sur les genoux de Claire, la femme d’un aviateur. Dans des confidences trop intimes, les invités de mon père, Jean Phillipe, débattent sur une affaire toxique concernant Alice, la fille du maire, qui se serait envoyé le bossu dans le musée du village, en haut et en bas !

«Ma Loute», dit Céline à mon père, «Cette fille de Monaco ne veut pas de scandale, mais après quelques nuits révolutionnaires, il faut bien le dire, elle est pire que quatre Emmanuelle !»
«T’es folle ou quoi ?» répondit mon père, les oreilles entre les dents. «Juste quatre petites aventures avec Reinette et Mirabelle, les femmes du sixième étage !».
«Les deux profs ? Un début prometteur pour cette potiche ! Ce ne sont pas des petits rien du tout ! Vous oubliez Alceste sur sa bicyclette, le colonel Chabert et Beaumarchais ! Et dans la maison, en plus ! En plein conseil de famille ! Je connais tout ça par cœur, je vous assure, elle mérite le Molière d’une zig-zag story ! Et bien qu’elle ne soit pas la plus discrète, nous ne savons toujours rien sur Robert ! »
«Oh vous savez, ma chère, le mode d’emploi, hommes, femmes, c’est un peu comme sur la planète Uranus : rien de solide, et pourtant un air si pur !»
«Rendez-vous compte, six crimes sans assassin ! Tout ça pour ça ! Quelle série noire ! Adieu la vie et tout le monde en boite !
«Ma petite, au nom du peuple français, il ne faut jurer de rien, ce n’est peut-être pas elle ! Buvez votre triple sec et oubliez cet échafaud magique que vous imaginez.»
«Ne m’appelez pas petite ! Je n’imagine rien, c’est le veilleur de nuit, Henri Pick, qui m’a parlé de ce mystère pendant une petite heure de tranquillité. Il parait que l’assassin portait une hermine, et elle en porte une ! Sans doute payer avec l’argent trouvé dans le mur. Elle les a tués dans son étreinte du diable, je vous le dis !»
«Nous ne connaissons que dix pour cent de l’histoire. En attendant Godot, l’homme pressé, nous devrons garder le secret. Cette folle électrique a peut-être tué tous ces partenaires de la société de chasse, mais son arrivée à New York sonne la cloche. Le meilleur reste à venir…»


Un acteur aux logorrhées qui m’hypnotisent, aux émotions débordantes, à l’intellect bouillonnant et enflammé, j’ai nommé : Fabrice Luchini. Talentueux, touchant, j’aime l’écouter jouer avec les mots, les détourner et leur trouver des significations profondes et improbables. Aussi excentrique que modeste, il est le caméléon de l’écran. Il se téléporte d’un rôle à un autre et évolue le plus tranquillement du monde dans tous les registres. Brûleur de planches à ses heures, il dépèce, anatomise et parcellise chaque mot de livres choisis pour la circonstance. Moments structurés, tant l’entrée et la sortie en sont délicieusement violentes. Un univers duquel nous ne sortons pas sans au moins une question. Il est une supernova qui vous éclabousse en une explosion de paillettes d’étoiles.

«Un artiste, une histoire», c’est un moment purement fictif, une écriture instinctive de l’auteure dans un coin de canapé à une heure improbable

© Copyright 2021 Florence DAUPHIN

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